À l’origine, “Quinzinzinzili” est le titre d’un roman de l’universitaire Régis Messac (1893-1945). Depuis quelques années déjà, c’est aussi le titre d’une excellente revue trimestrielle rendant hommage non seulement à cet écrivain, mais aux mouvements intellectuels de l’Entre-deux-guerres. Car, s’il fut l’auteur de la thèse “Le «detective Novel» et l'influence de la pensée scientifique” (publiée en 1929 et rééditée par Les Belles Lettres, récompensée en 2012 par le Prix Maurice Renault de l’association 813), Messac fut un écrivain éclectique des littératures populaires ("Valcrétin", "Le miroir flexible", "La cité des asphyxiés", "A bas le latin !").
Étant un des principaux contributeurs de la revue "Les Primaires", il participa à la réflexion sur son époque, et sur le sombre avenir qu’il fallait redouter. On en a un bel exemple dans ce n°31 de “Quinzinzinzili” : en décembre 1933, Messac signe un article présentant une nouvelle publication, “Commune”, revue d’obédience communiste. Pacifiste, Régis Messac souligne : “Il est évident que si la dictature de Hitler parvient à durer, nos nationalistes préconiseront une alliance avec lui. À ce moment-là, il faudra faire croire au bon public français que le bel Adolf est un homme de génie et toute une part de la presse française lui prodiguera les flatteries les plus plates.” Quelques lignes prémonitoires, c’est peu dire, mais combien de gens avaient alors cette lucidité sur un proche futur dramatique ?
Dans ce n°31 de la revue, les amateurs de polars pourront lire un article de Jean-Louis Touchant, qui fut longtemps le président de l’association 813 : “Grandeur et déclin du Detective Novel”. Il s’agit d’un parfait résumé de l’évolution de la littérature policière, des origines jusqu’au roman noir actuel, en passant par les piliers du roman d’enquête ou plus sociétal. On a souvent prédit la mort de ce genre littéraire, alors qu’il s’est logiquement adapté à chaque époque. Dans ce même numéro, on nous parle d’un débat rediffusé chez France Culture, datant de novembre 1948. Des grands noms de l’édition d’alors dialoguèrent sur la question “Le roman policier est-il essentiellement anglo-saxon ?”.
Conformément à son objectif, “Quinzinzinzili” évoque cette fois encore des ouvrages actuels faisant référence à des intellectuels ayant œuvré tout ou partie dans les années 1920 et 1930. Ce qui fut le cas de François Fosca (1881-1980), dont un certain nombre de titres, sur la peinture et autres thèmes variés, méritent d’être rappelés. En 1937, il publia un essai intitulé “Histoire et technique du roman policier”. Hommage est aussi rendu à Karin Boye (1900-1941), Suédoise d’origine allemande, chrétienne et féministe, dont le grand roman “Kallocaïne” est à nouveau réédité. Une fiction sur les totalitarismes, dont il n’est pas impossible qu’elle ait influencé le “1984” de George Orwell.
Ce n°31 de “Quinzinzinzili” comporte bien d’autres articles, dont quelques lettres de Régis Messac issues de sa correspondance, et un texte sur Jean-Luc Buard, spécialiste de l’édition populaire depuis 1830 jusqu’à nos jours. C’est encore l’occasion de présenter la souscription pour le prochain livre de Régis Messac, un inédit, “La loi du Kampilan”. Publié aux Éditions Ex-Nihilo, ce tropical roman d’aventure sortira le 16 janvier 2017. Ce tirage est limité, il convient donc de pré-commander ce livre. Chaque numéro de la revue “Quinzinzinzili” coûte 7€. On peut s'y abonner en s'adressant à la Société des Amis de Régis Messac (71 rue de Tolbiac, Paris 13e). À Paris, cette revue est disponible chez plusieurs libraires. Les romans et autres écrits de Régis Messac sont réédités aux éditions Ex-Nihilo, 42bis rue Poliveau, Paris 5e.