À Rio-de-Janeiro, Teodoro Avelar Guimarães vit avec sa mère Patrícia, infirme en fauteuil roulant depuis l'accident qui causa la mort de son mari, et leur chien Sansão. Étudiant en médecine, Teo est depuis l'enfance indifférent au reste du monde. “Il n'aimait personne, ne nourrissait aucun attachement pour personne, n'éprouvait aucun manque, aucune nostalgie, aucune aspiration : il se bornait à vivre.” Existence routinière revendiquée : “Un vide rempli d'avance d'émotions ternes et timides. Et peut-être n'était-ce pas plus mal ainsi. En tout cas, il s'en accommodait.” Quand Noël approche, ce sont les vacances d'été au Brésil. Lors d'une soirée de fête où il s'ennuie autant que d'habitude, Teo fait bientôt la connaissance de Clarice Manhães, jeune fille menue âgée de vingt-quatre ans.
Teo est troublé par la désinvolture déroutante de Clarice, fille de bonne famille, étudiante décomplexée qui projette d'écrire un scénario de film intitulé “Jours parfaits”. Il s'arrange pour obtenir des renseignements sur elle, pour entrer à nouveau en contact. Clarice n'est pas dupe du jeu de Teo. Quand elle s'énerve contre lui, il l'assomme et la kidnappe. Il va la droguer avec un des médicaments de sa mère Patrícia, une fois rendus à son domicile. Teo doit calmer aussi le chien Sansão, qui a senti un problème, au risque d'empoisonner l'animal. Il se procure dans un sex-shop des objets de bondage, afin d'empêcher Clarice de s'enfuir. Teo évite de dire la vérité à sa mère au sujet de Clarice, évoquant sa nouvelle petite amie avec laquelle il va partir quelques temps en voyage.
En effet, Clarice avait prévu de s'absenter durant plusieurs semaines. Elle avait réservé un chalet isolé à l'Hôtel du Lac des Nains, à Teresópolis, afin de travailler sur son scénario. Teo et Clarice s'y installent, la jeune fille restant séquestrée et menottée. Pas évident que le jeune étudiant obtienne cette symbiose amoureuse qu'il espère : “Tu crois vraiment que m'enfermer et me faire des piqûres de narcotique toutes les cinq minutes va m'inciter à t'aimer ?” s'insurge Clarice. Néanmoins, leur première semaine de séjour se déroule à peu près bien, selon les critères de Teo. Il finit par acheter des alliances de fiançailles. Clarice fait semblant d'accepter sa demande en mariage, mais va tenter de prendre sa liberté en mains. Teo maîtrise la situation, punissant sa compagne.
Le violoniste Breno, véritable petit ami de Clarice, s'introduit nuitamment au chalet. Teo ne peut pas rester sans réagir. Le couple quitte rapidement les lieux. Puisque Clarice avait prévu de faire un repérage pour son scénario sur l'Ilha Grande, c'est la destination choisie par Teo. Non sans quelques soucis en cours de route. Il loue pour un mois une maison à une vieille dame prénommée Gertrudes, prénom qui fait fantasmer Teo. Par téléphone, il est ponctuellement en contact avec sa mère et celle de Clarice. Il paraît que la police est à la recherche de Breno. Malgré le décor idyllique, il se peut que la relation entre Teo et sa captive change brutalement. Et que la suite se complique bien davantage…
Raphael Montes écrit que sa mère lui suggéra : “Si tu essayais plutôt d'écrire une histoire d'amour ?” Ce jeune auteur brésilien (né en 1990) a suivi son conseil. En effet, il s'agit ici d'une intrigue romantique, d'une certaine façon. Toutefois, rien à voir avec la platitude de ces récits où, après tant de déceptions sentimentales, la belle héroïne larmoyante trouve (malgré quelques écueils) l'amour auprès du prince charmant, séduisant et équilibré, dont elle a toujours rêvé. Raphael Montes a concocté une aventure mille fois plus excitante que ces niaiseries à la guimauve. Non seulement les péripéties se succèdent sur un tempo de bon aloi, mais la psychologie de tous les personnages est d'une sacrée justesse.
S'apitoyer sur le sort malheureux de Clarice ? Décréter que Teo est cruel et pervers ? Ce n'est nullement l'intention que fait passer l'auteur. On comprend que, tous deux issus de famille honorables, Clarice et Teo sont des monstres d'égoïsme. La jeune fille se fiche des conventions, l'étudiant en médecine est centré sur lui-même. Absurdement, Teo maltraite Clarice pour se faire aimer, mais celle-ci s'aime-t-elle vraiment ? On trouve une belle part d'humour noir dans cette affaire. Difficile de citer des passages explicites, car ces sourires sont liés au contexte. Telle cette grande valise rose, si pratique pour transporter une frêle jeune fille. Suspense mouvementé, états d'âme et drôlerie se marient harmonieusement dans ce roman remarquable.
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