Printemps 2011. Médecin, Mars Catalano habite Bandy, village du sud de l'Aisne. Elle s'est installée avec son mari Tony voilà cinq ans à la Maison des Dames. C'était la propriété agricole de ses parents adoptifs, aujourd'hui retraités. Rénovée, la demeure dispose de plusieurs corps d'habitation. Ça permet à Mars d'y héberger des proches. Telle son amie la dépressive Rita, employée d'un ministère. Ou le neveu de celle-ci, Adam Soledad, jeune journaliste de vingt-cinq ans. Tous les deux vivent ordinairement à Paris, soit un peu plus d'une heure de trajet. Adam a une amie de cœur, Cécile Obindi, future journaliste, native de Cotonou (Bénin). À la Maison des Dames, habite aussi Benn, médecin tchadien réfugié en France, participant à un réseau d'aide à des compatriotes. Même si Tony, voyageur, est souvent absent, le quotidien de Mars Catalano est bien rempli.
Un amnésique admis en psychiatrie dans un hôpital parisien cherche à entrer en contact avec Mars. Il semble que cet octogénaire nommé Marcus Braun soit son père biologique. Il lui ressemble, et connaît son vrai prénom, Marcelle. Se prétendant en danger, il apparaît paranoïaque. Les parents adoptifs de Mars n'ont, pour leur part, aucune information sur ses origines. Adam s'intéresse au cas de Marcus. Il ne tarde pas à découvrir l'adresse où logeait ce vieux magicien, rue Gambon. Avec sa compagne Ninel, qui a disparu quelques temps plus tôt, il faisait partie d'une communauté de personnes âgées qui se font appeler “les Indignés gris”. Toutes et tous ont, autrefois, appartenu au monde du spectacle. Plus tard, quand elle leur rend visite, Mars en apprend davantage sur le parcours de Marcus. Et surtout sur Catherine, cette mère qu'elle n'a pas connue.
Marcus a été abattu à l'hôpital. Ce n'est pas le seul cas de morts suspectes d'octogénaire, ces derniers temps. Il y eut aussi un certain Marc Alfort, vivant en Île-de-France. Ainsi que Marek, vieil éleveur de chiens à Bandy, dans l'Aisne. Trois hommes qu'Adam a interviewé pour un reportage destiné à une radio. Viendra ensuite le tour de Dora Wolf, une ancienne skipper âgée de quatre-vingt-cinq ans, vivant à Douarnenez, qui a coulé avec son voilier.
Si ça attire l'attention de Mars et de ses proches, la policière Aude Coutty et son amie la commissaire Beaudou vont bientôt vivement soupçonner Adam. Car il venait d'avoir un entretien en Bretagne avec Dora Wolf, à la vieille de sa mort. De son côté, Rita ne se porte pas mieux. D'autant moins que Sokhal, venu d'Irak, l'a recontactée. Cet homme fait partie d'une organisation agissant dans l'ombre, dirigée par une dame prénommée Fréha et son complice espagnol Teodoro. Les policières ou Mars et sa tribu, qui découvrira les dessous de cette série de morts suspectes chez des gens de plus de quatre-vint ans ?…
“Vieilles peaux”, la formule du titre semble inélégante. Elle indique le thème traité, le cas des gens vieillissants dans la société française actuelle. Après avoir été “d'âge mûr” en tant que quadras et quinquas, nous serons des “seniors” en devenant sexagénaires. Donc, nous resterons actifs, dynamiques, “encore jeunes”, même à l'heure de la retraite. Il ne s'agit pas seulement d'une question de langage, ou d'un refus de vieillir. L'objectif est tout autant commercial, au sens large. La population visée est de plus en plus nombreuse. Une part d'entre elle dispose d'un bon pouvoir d'achat. C'est ainsi qu'on incite ces “pas si âgés” à la dépense, à s'offrir une prétendue nouvelle jeunesse. On se laisse aisément duper, car il est tellement facile de feindre d'ignorer les ennuis de santé galopants qui nous attendent.
Si la Maison des Dames se veut un lieu d'accueil apaisant, au centre de cette histoire, on trouve d'abord et surtout une médecin humaniste, Mars Catalano. Entourée de plusieurs personnes, elle va en croiser un certain nombre d'autres, assez insolites. On sent que c'est là un choix de l'auteure, optant pour la diversité des portraits, et une autonomie dans le vécu de ces personnages. Chacun étant suffisamment singulier, le lecteur ne s'y perd pas. Danièle Ohayon a été journaliste radio pendant un quart de siècle. Pour ce premier roman, elle a choisi la littérature policière. Sans doute par goût de ce genre populaire, mais aussi parce qu'il permet de développer à la fois des idées et des intrigues, des ambiances et des péripéties. Plutôt qu'un strict roman d'enquête, c'est un climat empreint de questions qui nous est proposé. Ce qui aboutit à un fort agréable suspense.