À l'occasion des 70 ans de la Série Noire, cette collection réédite en un seul volume cinq titres de Jean-Bernard Pouy : Nous avons brûlé une sainte (1984) - La pêche aux anges (1986) - L'homme à l'oreille croquée (1987) - Le cinéma de papa (1989) - RN 86 (1992).
Deux exemples des intrigues de J.B.Pouy :
"L'homme à l'oreille croquée" : Dans le train qu’il emprunte de Nantes à La Rochelle, Marcel (15 ans et demi) rentre de vacances scolaires. Un grave accident se produit. Marcel reste bloqué plusieurs heures sous des tonnes de tôle. Il n’est pas seul : Marie-Claude, une jolie jeune femme, est bloquée avec lui, tout contre lui. En attendant les secours, il broie du noir. Ils sont finalement sauvés. Retour au collège, puis nouvelles vacances chez son copain Eric. Il est contacté par un type patibulaire, qui lui parle d’Arlette (le vrai prénom de Marie-Claude). Si elle est encore vivante, Marcel doit la retrouver, la prévenir du danger. Et c'est parti pour un pénible périple vers le Centre-Bretagne, ou elle se cache...
"RN 86" : Léonard ignore pourquoi son épouse Lucie avait tant changé depuis son retour d’un stage dans le Gard. Il ne comprend pas pourquoi elle s’est suicidée. Il se rend dans la région de Nîmes, s’arrête à Remoulins, sur la R.N.86. Non loin du fameux Pont du Gard, dont Lucie lui avait adressé une carte postale. Il lui semble que cet ouvrage majestueux est lié à la mort de sa femme. La gendarmerie, trop occupée à l’époque, n’a aucun motif de se souvenir de « l’accident » de Lucie. Ses amis de stages non plus ne renseignent guère Léonard. Vague piste, d’un blond nordique, vu avec elle. Le hasard conduit Léonard dans un luxueux hôtel de Castillon. Il y rencontre un écrivain original. Celui-ci se souvient de Lucie et de son amant…
Dans une interview pour L'Express du 5 mars 2015, Jean-Bernard Pouy répond qu'il n'a d'autre ambition que de raconter des histoires. À la question d'Eric Libiot : “Aujourd'hui, les frontières entre littératures "noire" et "blanche" semblent davantage poreuses ?”, J.B.Pouy répond : “[…] Le roman noir, lui, parce qu'il est militant, résiste à cette porosité. C'est la différence entre un auteur et un écrivain. Entre un type qui joue dans l'équipe de Mantes-la-Jolie et celui qui veut signer au PSG. Un écrivain se prend pour un écrivain, un auteur publie des romans. Je suis auteur. Un écrivain a un chat et écoute Mozart. Moi, du punk. Je suis un papier gras collé à la chaussure de James Joyce. Les écrivains peuvent se comparer à lui, je peux juste envisager d'écrire un roman aussi bon qu'un polar de Chandler. Cela ne m'est pas encore arrivé mais c'est possible.”
Voilà plus de trente ans que Jean-Bernard Pouy tutoie le polar. Ainsi que les lecteurs dans les festivals, sans hypocrisie, considérant que les amateurs de polars ne forment qu'une seule et même famille. J.B.Pouy est direct, cash, “à prendre ou à laisser”. Vous ne l'avez pas vu depuis six mois, un an ? Qu'importe, il s'adresse à vous comme si vous vous étiez quittés la veille. Vous débutez une conversation ? Il embraie sur une anecdote piquante, emprunte un jeu de mot à son ami Patrice Delbourg non sans le citer, conseille la lecture d'un auteur, ou évoque un projet qui verra ou non le jour. Si vous le croisez de temps à autre, il y a des chances qu'il vous adopte. C'est ainsi que grandit depuis trois décennies le cercle familial polardeux de Pouy.
Il n'est pas de ceux qui considèrent comme “sacré” ce qu'il écrit, romans ou nouvelles. Il ne vient pas vendre son dernier ouvrage, ni argumenter sur celui parmi ses livres qui surpasseraient les autres. Ça vous plaît, ses bouquins ? C'est tant mieux. Sinon, vous avez le choix dans tout ce qui est publié. Vous préférez lire d'autres polars, soyez certains qu'il ne s'en formalisera pas. Néanmoins, avec “Tout doit disparaître”, les lecteurs pourront redécouvrir quelques-uns des savoureux premiers titres de J.B.Pouy.
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