Ce livre recense d'abord quatre affaires criminelles s'étant déroulées à New York, autant de cas fort différents. Ayant comme décor le quartier du Queens, “Pour l'amour d'une femme” remonte à l'année 1927. Ruth et Albert Snyder sont mariés, mais les querelles sont permanentes dans le couple car ils ont des caractères très différents. Quand elle fait la connaissance de Judd Cray, marié de son côté, Ruth Snyder devient sa maîtresse. Elle ne tarde pas à imaginer des projets de meurtre, avec des débuts de passage à l'acte. Elle finit par souscrire des assurances-vie, qu'elle fait frauduleusement signer à son mari. À la première date prévue pour supprimer Albert Snyder, Ruth n'a pas réussi à lui faire avaler du produit pour l'endormir. C'est un samedi soir, au retour d'une fête chez des amis, que le mari devra être supprimé par le couple d'amants. Si tout est prêt, Judd Cray n'a sans doute pas le sang-froid nécessaire pour opérer proprement.
C'est en 1940-41 que “Le fou à la bombe” commença à faire parler de lui à New York. Il se manifesta à plusieurs reprises, déposant des bombes artisanales dans des lieux publics. Il cessa ce petit jeu durant dix ans, avant de le reprendre en 1951. Sa dix-septième bombe explosa en mars 1954 dans les toilettes pour hommes de la gare de Grand Central. Puis il y en eut une autre au Radio City Music Hall, causant à chaque fois des blessés légers. En février 1956, il recommença à la gare de Pennsylvanie, puis en fin d'année dans un grand cinéma new-yorkais et en d'autres lieux. La police n'était pas inactive depuis ses premiers méfaits. Grâce à ses écrits, on savait où il postait ses lettres, on supposait qu'il avait été employé de la Consolidated Edison. Plusieurs pistes furent explorées, plusieurs suspects arrêtés. Les comparaisons d'écritures aidèrent peu les enquêteurs. L'affaire virait à la paranoïa dans la population. L'homme fut identifié fin janvier 1957.
Paru en 2012 chez Actes Noirs, le remarquable roman “De bons voisins” de Ryan David Jahn s'inspire de l'affaire intitulée ici “Les trente-huit assassins de Kitty Genovese”. En mars 1964, Kitty est une jeune femme de vingt-huit ans. Cette rousse serveuse rentre généralement chez elle tard dans la nuit. Elle habite le tranquille quartier de Kew Gardens, logeant dans un coquet immeuble double. À trois heures-vingt du matin, à peine sortie de sa voiture, Kitty est poignardée à plusieurs reprises par un agresseur. Elle appelle à l'aide, sans réaction du voisinage. Le tueur revient lui asséner des coups de couteau. Kitty se traîne vers son immeuble, alertant encore faiblement les voisins. Ils sont quelques-uns à l'avoir entendue, mais quasiment aucun n'est intervenu. Kitty est décédée, les secours arrivant trop tard. Face à ce cruel manque de civisme, une campagne tenta se sensibiliser les habitants. Mais le quartier ne voulait déjà plus entendre parler de l'affaire.
Dans “Je l'ai tuée, pardonnez-moi”, le procès d'Alice Crimmins s'est tenu en 1969, pour un odieux double crime commis trois ans plus tôt. Elle était alors séparée depuis un an et demi de son mari Edmund Crimmins, qui avait entamé une procédure pour avoir la garde de ses enfants en bas âge. Il est vrai qu'Alice était une femme dénuée de moralité, qui collectionnait les amants. Elle savait aussi séduire, et même fasciner, des hommes tels que Joseph Rorech. Lui parla-t-elle vraiment du projet d'assassiner ses enfants ? Peut-être par allusion. Quand on retrouva les corps de sa fille et de son fils, les explications d'Alice furent embrouillées, peu plausibles. D'autant que la voisine, Sophie Earomirski, fut témoin d'une partie des faits, cette nuit-là. L'autopsie ne donnait que des réponses imprécises, ce dont se servit la défense d'Alice. Certes, on n'était pas là pour juger la réputation de cette femme, mais cela pesait lourdement sur le dossier.
La deuxième partie du livre traite de la mafia new-yorkaise, retraçant plusieurs épisodes de la vie de Vito Genovese (1897-1968). Dans son célèbre roman “Le parrain”, Mario Puzo s'inspira largement du personnage, avant qu'il soit incarné au cinéma par Marlon Brando. Il est aussi le héros du film “Cosa Nostra” de Terence Young (1972). “À sa mort, Genovese était le chef de Mafia de New York, position qu'il avait obtenue au prix d'un dur labeur...” Si, sur la fin de sa vie, il se comportait avec bonhomie, ce gangster restait quand même le successeur de Lucky Luciano. Après avoir écarté sans états d'âme d'autres caïds concurrents, Vito Genovese est un “capo di tutti capi” fort contesté. Même lorsqu'il est emprisonné, il reste toutefois le Boss. Avec lui, le bizness fructueux et le crime sanglant vont de pair. À New York, l'emprise de la Mafia ne faiblit pas à cette époque, rendant la violence omniprésente.
Ce “New York crime blues” fait suite à un premier tome, “Le bled aux méchants”, traitant de l'histoire du crime à New York dans l'Entre-deux-guerres. Second titre où Jonathan Craig et Richard Posner évoquent de façon vivante la mafia contemporaine d'alors. Ainsi que ces quatre dossiers criminels plutôt singuliers, typiquement américains pourrait-on dire car ils eurent peu d'écho ailleurs. C'est un des rares cas où la Série Noire publia des livres qui n'étaient pas des fictions. Mais leur parenté avec le roman noir est indéniable.
serie noire 70 ans - Le blog de Claude LE NOCHER
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