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30 janvier 2015 5 30 /01 /janvier /2015 05:55

En cette année 1734, Voltaire va avoir quarante ans. Son ouvrage “Lettres Philosophiques” a été condamné par les autorités royales. Il a été contraint de se réfugier au château de Cirey, dans le duché de Lorraine, chez son amie Émilie du Châtelet. Malgré les mirabelles et la cuisine locale, Voltaire s'ennuie de Paris où il est banni. Il y retourne clandestinement afin de retrouver Émilie, avant qu'elle se laisse séduire par Maupertuis, savant en vogue.

Quand il arrive chez la marquise, le cadavre empoisonné d'une soubrette vient de sortir d'un placard de cuisine. Ni Maupertuis, ni Voltaire n'ont vraiment de solution, car l'alerte a été donnée. Sollicitée par le lieutenant général de police Hérault, Émilie du Châtelet joue la comédie de l'ignorance. Une noble dame n'a pas à se préoccuper d'une simple servante, que diable ! Si René Hérault poursuit l'interrogatoire dans ses bureaux, ce n'est pas qu'il la suspecte, mais parce qu'il est sous le charme incontesté d'Émilie.

Voltaire a bien vite quitté la demeure de la marquise, retournant à son ancien domicile. Non pas qu'il compte sur l'assistance du couple Dumoulin, ses logeurs chafouins. Mais l'aide du gros abbé Linant, son ancien secrétaire prisonnier dans leur grenier, peut s'avérer utile. Encore qu'il pense davantage à s'empiffrer. Voltaire va successivement se faire engager chez l'écrivain Montesquieu puis chez l'épistolière Mme du Deffand, profitant que tous deux soient bigleux. Il ne profitera guère de l'hospitalité du comte d'Argental, fera quelques dépenses au frais de Maupertuis, avant de s'installer chez des nonnes. S'il doit se grimer, c'est facile pour ce Fregoli avant l'heure qui pense posséder “les plus belles fesses de la littérature française.”

Quoi qu'il en soit, Voltaire doit garder un œil sur sa belle Émilie, invitée à résider chez Hérault, tout en menant son enquête. La jolie marquise n'aurait jamais dû recevoir cette luxueuse “maison de poupée”, décorée avec soin, garnie de petits personnages. Le service de surveillance du courrier a mal dirigé ce précieux objet. Avec la bénédiction du lieutenant général Hérault, Voltaire se renseigne chez une modiste malgracieuse, puis chez l'artisan qui fabriqua cette merveille de jouet. Restant officiellement recherché, sous menace d'embastillement, Voltaire frôle l'arrestation chez un perruquier saxon qui se fait son complice.

C'est donc ladite “maison de poupée” qui s'avère empoisonnante. Du moins, en la tripotant, faut-il se méfier d'insidieux dards mortels. Émilie du Châtelet finit par situer la demeure ayant servi de modèle à ce remarquable jouet. Déserté aujourd'hui, l'hôtel particulier de Parolignac fut le sinistre lieu d'un crime, dit-on. Serait-ce dans les salons mondains que Voltaire trouvera les preuves de ce qui pourrait bien être un complot ?…

Frédéric Lenormand : Élémentaire, mon cher Voltaire ! (Éditions J.C.Lattès, 2015)

Depuis “La baronne meurt à cinq heures” (2011, Prix Arsène Lupin), c'est la cinquième aventure voltairienne que nous raconte Frédéric Lenormand, auteur chevronné. Il s'agit d'une comédie policière enjouée, qui s'amuse avec les péripéties (revisitées) de la vraie vie de son héros. Que l'on imagine pas le vieux Voltaire, quelque peu assagi, réfugié en son château de Ferney, assis dans son fauteuil et se consacrant à l'écriture. Car c'est un Voltaire encore jeune et frétillant, se gaussant des littérateurs de son temps (ainsi que du compositeur Jean-Philippe Rameau), amoureux de l'intelligente et ravissante Émilie, échappant d'un air sautillant à la police royale, qui nous entraîne dans son sillage.

Philosophe et aventurier ? La biographie de Voltaire nous montre que son existence fut effectivement agitée. Ses moments de répit ne furent que temporaires, on le sait. À vrai dire, c'est l'époque du roi Louis XV qui s'y prêtait, riche en manigances et conspirations. Une quinzaine d'années plus tard, le chevalier d’Éon en sera l'illustration. Si l'auteur se base sur des personnages et des faits d'alors, il choisit de traiter l'Histoire avec le sourire. On se plaît à penser que le pétillant Voltaire, doté d'un esprit vif et caustique, aborda avec la même énergie endiablée les vicissitudes de son parcours. Entre fluidité du récit, humour et suspense, un roman “historique” fort excitant.

 

— Disponible dès le 4 février 2015 —

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commentaires

Y
Salut Claude,<br /> j'ai lu les précédents, de purs moments de drôlerie, je crois que je vais me laisser tenter<br /> Amicalement,
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C
Bonsoir Yves<br /> C'est franchement très sympa, une façon de désacraliser l'Histoire. Et on aime imaginer ce Voltaire plutôt jeune et fringant ! Amitiés.

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