Le Trégor se situe sur la côte nord-ouest de la Bretagne, du côté de Lannion. Ancien marin sexagénaire, Fanch Bugalez s'est y installé à Trébeurden avec sa famille. Gwendoline, son épouse venue du Saskatchewan (Canada), ex-chanteuse, est âgée de vingt-cinq ans de moins que lui. Ils sont les parents du petit Valentin, et de sa sœur. Ils ont repris le “Café du Loup rouge”, bar d'habitués contribuant à la vie locale. Eugène Cabioch, dit La Brebis, vieil ami de Fanch n'a pas loin de soixante-quinze ans. Tout en gardant ses bases dans leur Trélouzic natal, où ils ont vécu plusieurs aventures, Eugène reste proche de Fanch. Ils sont toujours en contact avec le commissaire Cesare Le Tellier, qui officie dans la région. Ce dernier va de nouveau devoir enquêter sur des crimes perpétrés dans les parages.
On a assassiné un fossoyeur, employé communal de Trébeurden, qui creusait une tombe. Le tueur a emporté un squelette qui gisait là, bien dissimulé. Puis c'est une femme qui est découverte morte, allongée dans un terrain vague, entourée de coquillages signant une curieuse mise en scène. Chanteuse lyrique âgée de trente-deux ans, Alexandra a été poignardée. Il ne faudrait pas que ces meurtres causent trop de remous, car actuellement un investisseur anglais séjourne par ici. Dave Nakheel-Sandman semble avoir des projets respectueux de l'environnement et des lois en vigueur. Toutefois, ses relations discrètes avec Susheila Winterhorn, une Australienne, pousseraient à s'interroger si elles étaient connues du grand public. Car tous deux sont liés à l'industrie sablière.
En effet, depuis quelques temps, des multinationales visent le sable du littoral breton, en particulier. L'extraction, assez près des côtes, ne serait pas du tout dommageable, selon les dossiers bien ficelés qu'ils soumettent. Pourtant, des études plus fouillées montrent les inévitables conséquences pour la dune sous-marine et la faune qui y vit, sur les courants marins, et pour l'ensemble des activités touristiques. Un collectif d'association a dénoncé le futur gâchis, “Le peuple des dunes en Trégor”. Se fiant à son instinct, Eugène Cabioch ne cache pas son scepticisme envers Dave Nakheel-Sandman. Tandis que des agences immobilières de la région ont reçu des lettres anonymes entraînant une petite enquête des gendarmes, le commissaire Le Tellier pourrait explorer la piste d'un expatrié disparu…
Des débats concernant l'extraction de sable non loin des côtes ont bel et bien soulevé des réactions de la part des habitants, du Morbihan jusqu'au Trégor. Il ne s'agit pas d'un esprit de contestation contre toute modernité, tout changement. Certes, chacun sait qu'il faut du sable pour construire, pour le béton. Plus on le soutire près de chez nous, moins il coûte cher, c'est entendu. Toutefois, ce n'est pas sans influence sur l'environnement et le climat, ni sur l'économie locale. Des efforts sont faits pour protéger le littoral, attention aux effets néfastes de ces exploitations du sable. Tel est le thème qui sert de toile de fond à cette intrigue sympathique. Car, entre le gendarme retraité Félix Stereden, le vieil anar Eugène Cabioch, et quelques autres protagonistes, on sourit également.
Ce ne sont pas des enquêtes policières balisées ou rectilignes, que Yann Venner nous présente dans ses romans. Son commissaire explique très bien que la réalité des faits n'est pas obligatoirement le principal critère : “Mais le réel n'est pas que tangible, n'est pas fait uniquement d'évènements, de lieux, de mots prononcés. Bien sûr, le réel est cela, chargé d'actualité et d'histoire, mais s'y ajoute aussi la somme infinie de pensées et de leurs revirements, la somme des intentions, des éclats de désir ou de mémoire, des hypothèses, des possibles demeurés inaccomplis, des intuitions.” L'auteur nous invite à entrer dans l'univers de cette population qui, autour de Fanch Bugalez, aspire à une vie respectueuse des autres et de la nature. Une tranquillité troublée par ces faits de société inspirés du quotidien, et quelques crimes qui sont – ou non – en rapport avec tout cela.