Bien d'autres romancières sont célèbres pour leurs fictions criminelles. Néanmoins, si le public ne retient qu'un seul nom pour désigner la Reine du Crime, ce sera Agatha Christie (1890-1976). Issue de la bonne société britannique, elle connut une vie bien remplie et un immense succès avec ses romans policiers. Ne regardons pas avec un dédain ironique son œuvre, bien plus excitante qu'usant de ce conformisme qu'on lui attribue souvent. Cette encyclopédie sur l'univers d'Agatha Christie explore quantité de facettes de son existence et de ses histoires. Définitions pas trop longues, toujours claires, pour cerner ses romans, ses personnages, certains lieux marquants, mais aussi les films, adaptations télévisées ou radio, pièces de théâtre, jeux vidéos et bédés tirés de ses créations.
On se précipitera sûrement vers les “entrées” concernant ses héros récurrents : Hercule Poirot, le Belge à moustache, aux légendaires petites cellules grises ; Miss Jane Marple, la vieille dame observatrice de St Mary Mead riche de douce sensibilité ; Tommy et Tuppence Beresford qui ont créé leur agence de détectives, un couple dont on nous rappelle ici les origines ; sans oublier le capitaine Arthur Hastings, fidèle faire-valoir d'Hercule Poirot, ni la romancière Ariadne Oliver se mêlant d'enquêtes, bien proche d'Agatha Christie elle-même. L'inspecteur Japp a bien le droit à sa notice, lui aussi. De Peter Ustinov à David Suchet, plusieurs articles sont dédiés aux comédien(ne)s qui ont incarné Poirot, ou vus dans des adaptations de ses intrigues. Retenons aussi le nom de Joan Hickson qui interpréta délicieusement Miss Marple pour la télé, de 1984 à 1992. Et celui d'Angela Lansbury, dont le personnage de Jessica Fletcher (Arabesques) fut très “christinien”.
Bien sûr, les lieux (au sens large) font partie de l'univers d'Agatha Christie. Qu'il s'agisse d'un hôtel en bord de mer, d'un manoir victorien, ou d'une demeure villageoise, c'est le théâtre dans lequel se joue souvent l'acte criminel. Burgh Island, par exemple, n'est pas un endroit anodin, puisqu'il inspira l'auteure. On évoque aussi Bagdad, en se souvenant qu'Agatha Christie voyagea jusqu'en Mésopotamie. Une “entrée” intéressante concerne les “villes imaginaires” dans l'œuvre de la romancière. Un détour par la Belgique évoque Spa et la ville d'Ellezelles, possédant une amusante particularité. Les lieux, ce sont encore les gares et les trains. L'Orient-Express, où Pierre Michel assure le service des wagons-lits, et le Train Bleu, mais aussi celui de 16h50 au départ de Paddington.
En décembre 1926, la disparition d'Agatha Christie fit grand bruit, une absence sans doute volontaire mais dont les détails ne furent jamais réellement résolus. Certes, on peut se renseigner ici sur Archibald Christie, premier mari de la romancière, père de sa fille unique Rosalind. Le cas de Max Mallowan, son second époux archéologue, est aussi à découvrir. On n'oublie pas non plus qu'elle écrit sous le pseudonyme de Mary Westmacott des livres plus romantiques, comme “L'If et la Rose”. Derrière ses intrigues purement policières, elle exploita avec autant de réussite des thèmes ayant trait à l'Espionnage ou au Fantastique. Bien entendu, un article évoque le Detection Club, dont Agatha Christie fut un des piliers. Il est même question de Chandler, pas de l'écrivain Raymond Chandler, mais d'un père et d'un fils héros d'une nouvelle dans “Les travaux d'Hercule”.
Alors quoi, il n'est pas question de meurtres dans cette encyclopédie ? Armes à feu, contondantes, tranchantes, noyades, strangulations, accidents, poisons divers, chantages, crimes à huis-clos, un peu d'adultère, vengeance, autant d'actes et de mobiles conduisant à tuer son prochain… et surtout à faire fonctionner son cerveau pour résoudre les énigmes alambiquées que l'auteure concocta. Prenons le cas de Félicie Bault, dans la nouvelle “Le quatrième homme” (recueil “Le Flambeau”) : une jeune femme, mais quatre personnalités selon les témoins qui en parlent. “Ce personnage digne de Stephen King a inspiré de nombreux auteurs, et notamment Mary Higgins Clark” nous rappelle-t-on.
Multiples “entrées” autour d'Agatha Christie, donc, puisqu'il est aussi question de bateaux, de surf, de chiens et de chats, d'avions, d'archéologie, de chocolat, de féminisme, de tous les romans et nouvelles de l'auteure, de nombreux thèmes. On ne se lasse pas de sauter d'une notice à l'autre, chacune attisant notre curiosité. Deux cahiers-photos évoquent en image la “présence” encore vivace d'Agatha Christie. Il faut absolument saluer le travail remarquable d'Anne Martinetti et Guillaume Lebeau. Le couple nous présente un ouvrage désormais indispensable pour tous les passionnés de Littératures policières et pour les admirateurs d'Agatha Christie.