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16 août 2014 6 16 /08 /août /2014 04:55

Le 20 mai, le policier Camille Verhœven est de retour à Paris après un congé exceptionnel. Ce gnome d'un mètre quarante-cinq n'exclut pas de passer sa soirée avec Anne, son amie de cœur. Un rendez-vous qui va être compromis. Car, si Verhœven, a peu porté attention à l'actualité, elle va le rattraper. À 17H, une explosion s'est produite rue Joseph-Merlin. Cet attentat aurait pu être meurtrier, ayant provoqué la chute d'un échafaudage. Par miracle, on ne compte que vingt-huit blessés, modérément graves. Les techniciens des secours ont été prompts à intervenir en professionnels, il est vrai. L'instigateur de l'explosion se trouvait à proximité des lieux, filmant l'évènement sur son téléphone portable.

Ce jeune homme de vingt-sept ans se nomme Jean Garnier. Ou John, officiellement. Il ne tarde pas à se livrer à la police, réclamant de parler à un seul interlocuteur, Verhœven. Il sera bientôt reconnu par Clémence K, jeune femme qu'il croisa peu avant les faits. Quant aux démineurs, ils s'aperçoivent que l'on a utilisé un obus datant de la Première Guerre Mondiale. Jean Garnier explique à Verhœven comment il s'y est pris pour trouver ces obus et organiser les attentats. En effet, il affirme que six autres bombes attendent d'exploser, une par jour tant qu'il n'aura pas ce qu'il exige. L'expert en déminage de la police estime que la version de Jean est parfaitement plausible.

Jean Garnier réclame que sa mère Rosie soit immédiatement libérée, et qu'on leur donne une somme de plusieurs millions pour fuir en Australie. Cette femme de quarante-six ans est en prison pour avoir tué la petite amie de son fils. Tandis que Louis Mariani, l'adjoint distingué de Verhœven, s'occupe de la coordination de l'enquête, les policiers se rendent à Bagnolet. C'est là qu'habitent ensemble Jean et Rosie. Une perquisition qui confirme la vie basique de la mère et de son fils. Dans le quartier, Jean a la réputation d'être bricoleur, mais peu courageux. Nettement insuffisant pour comprendre les motivations du poseur de bombes, pourquoi il tient tant à partir au bout du monde avec sa mère.

L'Antiterrorisme a pris le relais de l'interrogatoire de Jean. Sans le moindre succès, celui-ci campant sur ses positions. Néanmoins, il accepte de confier à Verhœven qu'une bombe va exploser à 9H dans une école maternelle. Il y en a plusieurs centaines à Paris, des milliers en France. S'il faut évacuer tous le monde, ça ne va pas arranger les politiciens qui ont déjà du mal à gérer la crise due à cette menace. C'est par hasard qu'on va découvrir boulevard de Mulhouse un autre engin explosif, le cinquième programmé par Jean. Pour Camille Verhœven, il faut agir et comprendre au plus tôt l'attitude de Jean Garnier…

Pierre Lemaitre : Rosy & John (Le Livre de Poche, 2014)

Pierre Lemaitre a été récompensé par le Prix Goncourt 2013. Mais il était déjà connu et apprécié des amateurs de polars. Pour sa trilogie consacrée au policier Verhœven (Travail soigné, Alex, Sacrifices) ainsi que pour ses deux autres suspenses (Cadres noirs, Robe de marié). Dès ses débuts, il nous a épatés par la magnifique construction de ses intrigues. Son écriture, quelque peu discutable pour ses tous premiers titres, s'est bientôt améliorée, devenant réellement stylée. On le vérifie d'ailleurs dès le départ dans le présent roman. Il s'agit d'une histoire plus courte (140 pages, quand même), quatrième volet inédit de la trilogie Verhœven. Oui, ça devient une tétralogie, mais combien de gens comprennent le sens de ce mot ? Tandis qu'une trilogie, on a l'habitude.

À travers certains portraits (le gamin à la clarinette, la pucelle attendant son futur amant, la femme de ménage Farida, etc.) se dégage une part d'ironie. Certes, la menace reste redoutable et les faits dramatiques, mais l'auteur nous invite à prendre ainsi un peu de recul. Il offre également à Verhœven des comportements prêtant à sourire. Ce polar est aussi une manière de montrer à ceux qui l'ignorent encore que Pierre Lemaitre est, hormis son Goncourt, un excellent romancier dans cette catégorie.

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commentaires

P
J'en ai lu quatre de Pierre Lemaitre. Et effectivement, il a le don de construire des intrigues à rebondissements. J'ai acheté ce titre à sa sortie mais pas encore lu ... ça vient. Amitiés
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C
J'ai attendu quelques semaines pour le lire, moi aussi, car "rien ne sert de courir, il faut partir à point" comme disait La Fontaine. Surtout, il m'arrive d'intercaler des lectures un peu plus courtes entre deux romans épais. Demain, le suivant chroniqué fait 370 pages en poche, autre format. Amitiés.
O
Bonjour Claude<br /> Pour rebondir sur Sacrifices, je dois dire que j'avais été déçu moi aussi par ce roman. L'attitude incompréhensible d'Anne entre le début du roman et ce qu'il advient après. Mais j'avais moi aussi été bluffé par Alex et surtout Robe de marié . <br /> Amitiés
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C
Salut Paul<br /> &quot;Travail soigné &quot; et &quot;Robe de marié&quot; bénéficiaient d'excellentes intrigues, mais l'écriture restait moyenne (juste narrative, à mon goût). &quot;Cadre noirs&quot; est bien mieux écrit. Mais c'est avec &quot;Alex&quot; que Pierre Lemaitre tient sa tonalité, intrigue remarquable + écriture. On espère que le film sera tourné. Un jour, je lirai sûrement sont Goncourt. Surtout, j'espère qu'il poursuivra dans le polar avec cette maturité. Amitiés.
M
Je suis d'accord, l'auteur peut prendre des libertés avec les procédures ou la géographie, on est après tout dans la fiction, mais là, on a une incohérence, un manque de logique des enquêteurs sur lequel on pourrait passer si le final ne s'en trouvait pas entaché, un peu comme si Lemaitre n'avait pas joué franc jeu avec nous et cédé à la facilité....
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C
En effet, Max, si l'on reprend les deux premières règles de S.S.Van Dine, il faut tout dire au lecteur, ne pas éluder :<br /> 1. Le lecteur et le détective doivent avoir des chances égales de résoudre le problème.<br /> 2. L'auteur n'a pas le droit d'avoir recours, vis-à-vis du lecteur, à des ruses et des procédés autres que ceux utilisés par le criminel à l'égard du détective.<br /> Amitiés.
M
Bonjour Claude,<br /> J'ai beaucoup aimé la trilogie Verhœven, mais &quot;Sacrifice&quot; souffre d'une grave incohérence qui m'a un peu gâché mon plaisir. Une femme est hospitalisée suite à une violente agression. Peu après, une infirmière de son service surprend un homme qui essaie de s'introduire dans sa chambre, un objet qui pourrait bien être une arme à feu caché sous son manteau. La victime identifie son agresseur sur une photo, et les enquêteurs ne font pas alors ce qui paraît pourtant être élémentaire, à savoir montrer la dite photo à l'infirmière pour confirmation que l'intrus et l'agresseur sont bien la même personne. L'auraient-ils fait que l'intrigue s'en trouvait plombée car ( ne lisez pas plus loin si vous comptez lire ce néanmoins très bon bouquin) L'auteur de l'agression et l'intrus ne sont pas la même personne, mais on ne saura qu'à la fin du bouquin, car là repose le coup de théâtre final !<br /> Amicalement,<br /> Max
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C
Bonjour Max<br /> J'ai fait l'impasse pour &quot;Sacrifices&quot;, je l'avoue. J'avais été tellement bluffé par &quot;Alex&quot; que j'ai craint la déception. Pierre Lemaitre (dans Les cahiers du polar - Crimes à la Une) ne cache pas qu'il accommode ses intrigues afin qu'elles soient percutantes, pas forcément réalistes en tous points. <br /> Dans &quot;Rosy &amp; John&quot;, on pourrait aussi se dire que le suspect étant entre les mains de l'Antiterrorisme (alors que c'est à un juge d'instruction d'opérer, ou en sa présence), il y a peu de chances qu'on le laisse de nouveau à un Verhœven dans la réalité. Le polar qui imite trop les vraies procédures est-il plus convaincant ? Pas sûr.<br /> Amitiés.
P
Bonjour M. Le Nocher,<br /> <br /> Ce roman a en effet l'air d'une grande qualité.<br /> En cherchant la petite bête, observons :<br /> <br /> - Il n'existe pas à Paris de rue Joseph-Merlin ni de boulevard de Mulhouse, mais une rue Merlin dans le 18ème et une rue de Mulhouse dans le 11ème.<br /> On pourrait supposer que ce sont des approximations, mais aussi que Pierre Lemaître invente des artères, comme quand Edgar Allan Poe a inventé la rue Morgue.<br /> Chez Fred Vargas, le commissaire Jean-Baptiste Adamsberg habite boulevard Saint-Paul, qui n'existe pas en réalité. Didier Blonde dit qu'il faut comprendre rue Saint-Paul qui existe dans le 4ème, dans son ouvrage &quot; Répertoire des domiciles parisiens des personnages ( ou héros ) fictifs de la littérature &quot; , paru en 2010 aux éditions Pionnière. Epuisé, mais trouvable d'occasion et réédité vers 2012. Je vous recommande ce livre, dont je ne me souviens pas si j'en ai déjà parlé ou pas.<br /> <br /> - Curieux que John dise dans quel pays il projette de fuir avec Rosy sa mère. Il eût mieux fait de demander la rançon mais sans révéler où il voulait aller. Cela montrerait que ce n'est pas un terroriste professionnel. Mais il pourrait aussi brouiller les pistes en indiquant une destination précise.<br /> Ajoutons qu'en Australie ils ne seraient pas à l'abri de la justice française, cet Etat ayant une convention d'extradition avec la France.<br /> <br /> - On peut ne pas être d'accord et proposer que cette règle change peut-être que ce sera le cas, mais à ce jour en France la taille minimum pour entrer dans la police est d'environ 1m55 ou 1m60. Donc Verhoeven ne pourrait pas être policier, ou il faudrait que l'auteur lui ait attribué une taille au moins un peu plus élevée qu'1m45.<br /> Cette question de taille est fluctuante. Il y a encore 10 ou 15 ans, la taille minimum était de 1m71 dans la police et 1m68 dans la gendarmerie. Ce qui a été ramené à environ 1m60, peut-être sous Nicolas Sarkozy ministre de l'Intérieur.<br /> Et, dans la police scientifique, quand on travaille dans un labo, il n'y a je crois pas de taille minimum puisqu'il n'y a pas à affronter physiquement des personnes mises en cause.<br /> J'avais vu dans le Nouveau Détective il y a quelques années un article sur un policier en Grande-Bretagne mesurant 1m50, ce qui indique que la taille minimum pour entrer dans la police y est moindre qu'en France. Alors que dans la population la taille moyenne des Britanniques n'est pas inférieure à celle des Français.<br /> <br /> Cordialement
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C
Bonjour Philippe,<br /> Pierre Lemaitre dans Les cahiers du polar (Crimes à la Une), été 2014 : « Dans un autre livre, ALEX, mon héroïne doit traverser Paris, mais je n'avais pas envie de me documenter. Du coup, j'ai inventé une rue […] J'estime que si le lecteur note ces petits arrangements avec la réalité, c'est qu'il n'est pas dans l'histoire, et donc que j'ai raté mon coup. » <br /> Inventer une adresse, une rue, ça a toujours existé dans les romans, vous le savez. Il est vrai que les auteurs deviennent aujourd'hui extrêmement prudents. Dans « Aux animaux la guerre », Nicolas Mathieu ne cite aucune ville des Vosges. Quand il parle d'aller en ville dans la vallée, on devine que c'est à Épinal. De même, j'ai pu situer la pizzeria qu'il évoque dans plusieurs scènes (il me l'a confirmé), j'y ai même déjeuné lors de mes vacances en Lorraine... Dans « Des forêts et des âmes » avant pour décor le même département, Elena Piacentini invente des noms de villages. Fred Vargas fut prudente, elle aussi, quant à l'adresse d'Adamsberg... On se souvient des ennuis de Lalie Walker avec « Aux malheurs des dames ». <br /> Dans ce roman, l'expert policier en explosif dit à peu près : « On s'imagine que le terrorisme c'est très technique, en fait non » Pierre Lemaitre en fait la démonstration.<br /> La taille minimum pour les policiers, je me demande si ce critère existe encore chez nous. Et même s'il a jamais été appliqué sans dérogation. J'ai déjà évoqué le seul policier que j'aie un peu connu, ancien Résistant FTP non-communiste, dont la carrière avait peu progressé car il n'était pas gaulliste (il fut même prié de se mettre en congé durant les évènements de mai 1968). Je m'en souviens comme d'un homme trapu, mais pas très grand, sans doute autour d'1.60 m. Mais il est vrai qu'il était entré dans la police en 1945, époque où le recrutement devait être différent… <br /> Par ailleurs, tous les corps de métiers doivent légalement intégrer des personnes handicapées. Je me demande si c'est le cas dans la police.<br /> Amitiés.

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