Originaire de Nevers, Franck Bostik est policier depuis huit ans. Son père envisageait pour lui une grande carrière de footballeur. Durant un temps, Franck fut animateur sportif dans sa région. Il débuta ensuite comme flic à Police-Secours dans le 93. Puis, il fut affecté à un commissariat de quartier dans Paris. Franck pratique la police scientifique, laissant les arrestations à ses collègues. Il vit avec sa compagne Cécile, comédienne aux activités aléatoires, et son chien Paf. Un couple déséquilibré, proche de la rupture, pas seulement à cause de leur séduisante voisine Laure. Sa mère, qui habite Nevers, alerte Franck sur la disparition d'un jeune de dix-huit ans, qu'il a connu à l'époque où il était entraîneur. On le nommait “Patte-de-poulet”, mais il s'appelle Mathieu Lechartier.
La rupture avec Cécile étant inévitable, Franck s'accorde quelques jours de congés. Tant pis si son supérieur a besoin de lui. Avec le chien Paf, il prend la direction de la Nièvre. Ils vont loger chez Mathilde Lechartier, la sensuelle mère quadragénaire du disparu. Elle est l'amante du patron facho d'une discothèque locale, le Blue Box. En fait, celui-ci a essayé de se montrer bienveillant envers Mathieu, mais le jeune homme ne l'a jamais accepté. Franck interroge le voisin Simon, animateur au club de football qui traîne une mauvaise réputation, ainsi qu'un ado boutonneux du coin, le jeune mécano Alex. Il enquête aussi au Café de la Paix, dernier endroit où l'on ait vu Mathieu à Nevers.
Deux ou trois pistes se dessinent. Selon la police locale, un SDF prénommé Thomas mais qu'on appelle Le Sanglier pourrait être impliqué. Il y aurait aussi une fille au look gothique, qui fut vaguement amie avec Mathieu. Une autre fille, chanteuse d'un groupe rock métal, copine du jeune homme, semble moins concernée. Par ailleurs, on a peut-être vu Mathieu à la gare de Château-Chinon peu avant qu'il disparaisse. Ça reste assez confus de ce côté. Avec l'ado Alex, Franck visite les squats des toxicos et des clodos de la ville, fuyant même un tatoueur agressif. Ils finissent par retrouver la gothique Anaïs, dans les vapes mais en vie. Bien qu'on l'héberge chez Mme Lechartier, la jeune fille n'est guère coopérative.
L'amie rockeuse confirme une partie de l'emploi du temps de Mathieu, le soir où l'on perdit sa trace. Franck repère finalement Le Sanglier planqué dans une tour de la cathédrale de Nevers, blessé suite à une altercation. Il se montre méfiant, sa mémoire apparaît sélective. Néanmoins, il donne au policier une nouvelle piste, dans les forêts du Morvan rural. Dès le lendemain, Le Sanglier l'accompagne dans ces paysages naturels mais rudes. Ils ne sont pas loin de Château-Chinon, où Franck tente de trouver des témoins à la gare. C'est au hameau des Bardiaux que l'affaire prend un tournant décisif...
Tout le monde n'a pas la chance de voir son roman préfacé par Claude Mesplède, le grand spécialiste des littératures policières. Comme toujours, ce dernier vise juste quand il dit : “Laurent Rivière a bien retenu ses lectures et l'intérêt de son roman tient à son efficacité, à son écriture sans fioriture, à ses personnages attachants, tout simplement parce qu'ils sont humains.”
Oui, c'est un suspense sans le moindre temps mort que nous a concocté Laurent Rivière. Il est proche du behaviorisme, limitant au maximum les états d'âme et autres aspects psychologiques, s'en tenant pour l'essentiel aux faits vécus ou observés. Le policier est là pour mener une enquête, fut-elle officieuse. Pas pour consoler la belle Mme Lechartier, mère du disparu, ni pour empêcher la gothique Anaïs d'attenter à sa propre vie. C'est cette “efficacité” soulignée par Claude Mesplède, qui donne son tempo au récit.
L'un des côtés importants du roman noir, c'est la description sociale. Il s'agit de présenter aux lecteurs personnages et situations issus de la vraie population, de la vie réelle. Un restaurant où le menu est en langage morvandiau, un décor forestier qui fait frisonner, un éducateur sportif victime de rumeurs, et de nombreuses scènes donnent à l'histoire cette véracité indispensable. Ce sont les gens du cru que l'on côtoie ici, pour de bon, ceux dont on parle trop peu.
Ça n'empêche pas quelques passages souriants : “J'ai eu envie de boire un verre de gnôle. J'ai goûté la «Pomme». Un demi verre. Rhaaa... Bon sang. Y a pas que d'la pomme ! La gnôle du tonton flinguait.” Voilà de l'excellent “roman noir à la française”, formule nullement péjorative, car le résultat est très excitant.