Âgé de cinquante-cinq ans, Thelonious Avogaddro est détective à New York, après avoir fait partie de la police pendant de longues années. Marqué par une vie chaotique, il tente de trouver un peu d'équilibre auprès de la belle Patricia, architecte d'intérieur, de dix ans sa cadette. Amateur de jazz, Thelonious est natif de San Francisco. Son père octogénaire vient de mourir. Il restait son ultime famille. Sans tarder, il traverse les États-Unis jusqu'à la côte ouest. À son arrivée, le policier Flanagan – que Thelonious n'apprécie guère – lui apprend l'arrestation d'Howard Kendrick. C'est l'homme qui, quarante ans plus tôt, fut soupçonné du meurtre de Laura, la sœur de Thelonious. Ce repris de justice junkie vivait avec la jeune femme, qu'il avait entraînée dans la consommation de stupéfiants. Kendrick père, puissant businessman milliardaire, fit intervenir une brillante avocate afin de sortir son fils du pétrin. On lui trouva un alibi, pourtant incertain, et il échappa aux poursuites.
Howard Kendrick partageait désormais la vie de Cassandra Lassiter, productrice de cinéma connaissant un grand succès. Stacy Chapman, jeune employée à domicile de Cassandra, à été poignardée. On a forcé le coffre-fort de la maison, volant une belle somme d'argent. L'ADN de Kendrick, probablement sous l'effet de la drogue au moment du crime, a été retrouvé sur le cadavre de la victime. En arrêtant Kendrick, Flanagan a réussi ce que n'a pas su faire Thelonious en plusieurs décennies. Le détective est prié de donner maintenant à ses ex-collègues l'unique exemplaire restant du dossier sur la mort de Laura. Il compte négocier cet échange, afin que le coupable n'en réchappe pas une fois encore. Cliff Cops, ami Indien de Thelonious, toujours flic, admet que si Kendrick père est moins omnipotent que par le passé, il garde du pouvoir. Le détective le vérifie en lui rendant visite dans le bunker où il habite, une sorte de labo où il se pense invulnérable.
Le crash d'un avion de ligne au-dessus du Golden Gate fait la une de l'actualité. L'enquête est menée par Ricky Tonnot, que Thelonious a bien connu naguère. Malgré une pression médiatique forte, il accumule consciencieusement les éléments dans cette spectaculaire affaire. On apprend bientôt qu'une femme visitait le cockpit à l'heure du crash. Thelonious rencontre l'avocate de Kendrick au temps du meurtre de Laura, puis Suzan Moore, du FBI, qui pourchasse un serial killer. Il fait un détour par la Floride, autant pour passer le week-end avec Patricia, que pour s'entretenir avec un ancien psy au sujet du cas Kendrick. Au retour, la maison du père de Thelonious a été incendiée. Il a des raisons de penser que c'est sur ordre de Kendrick père. En confrontant quatre dates et le portrait de la victime, Stacy étant le sosie de Laura, le détective n'a plus de doutes. Pourtant, la découverte de la vérité sera plus sinueuse...
Après “La note noire”, récompensé par le Prix du premier roman au Festival de Beaune en 2009, Chris Costantini a publié deux autres titres remarqués : “À pas comptés” et “Lames de fond” (réédités aujourd'hui chez Versilio). Si certains préféreront suivre la chronologie, il est très facile de débuter par son quatrième roman (“Il n'est jamais trop tard” apparaît un titre de circonstance). En effet, Cris Costantini fait partie de ces auteurs à l'écriture nerveuse, qui plongent illico leurs lecteurs dans le vif du sujet.
Issu de la tradition du polar noir, détective quinqua, amateur de jazz comme l'indique son prénom, Thelonious est un personnage en perpétuel mouvement. Il a ses réseaux d'amis pour obtenir les meilleures infos. Au besoin, il traverse le pays pour quelques précisions. Il ne craint pas d'affronter d'ex-collègues bornés, ni le puissant père du présumé coupable. Sa vie privée ne peut pas vraiment être stable, mais il semble ne pas y renoncer. Côté perso, il garde un douloureux passif, le meurtre non résolu de sa sœur. Côté actualité, il y a ce crash encore tout récent quand il débarque à San Francisco. Lancé dans l'aventure, Thelonious dicte la cadence, accélère au besoin le tempo, et il n'y a plus qu'à le suivre.
Cette écriture “à l'emporte-pièce” (c'est-à-dire qui s'exprime de façon directe, incisive) est celle qui convient le mieux pour ce genre de roman. On est dans l'enquête efficace, dans le suspense percutant, dans la vivacité du rythme. Sans oublier quelques références à la musique, au roman noir et aux mythes du polar (“Comme Hitchcock, les grandes blondes glaciales me faisaient toujours de l'effet”). Une intrigue qui sait captiver ses lecteurs, ça fait toujours très plaisir.