Les auteurs de polars sont bien naïfs. À qui fera-t-on croire que les enfants sont des êtres innocents ? Dans les romans, on les place généralement en position de victimes. Il est fort rare qu'on les suspecte de méfaits, de crimes, si ce n'est pour les disculper ensuite. Ceci n'est que de la fiction, d'une trop grande candeur. En réalité, les mômes d'hier comme ceux d'aujourd'hui ont toujours été des monstres. D'infâmes salopiauds, de la graine de criminels, tous ces mineurs qu'il serait de bon aloi de protéger. Les romanciers participent à ce mythe si peu crédible de l'enfant pur.
Il suffit de lire l'ouvrage d'Annick Le Douget “Crime et justice en Bretagne” (Coop Breizh, 2011) pour revenir à la vérité. L'auteure cite “... le cas en 1824, de Marie Quéméneur, une fillette de neuf ans du Pays bigouden, coupable du meurtre de deux enfants de Plonéour, conduite sur décision de la Cour d'assises du Finistère dans une maison correctionnelle pour y être élevée jusqu'à l'âge de vingt ans. Ou encore en 1827, d'Yves Robert, jeune pâtre de dix ans, qui s'est vengé de ses maîtres en incendiant leur maison, et que la Cour d'assises de Saint-Brieuc acquitte, mais ordonne qu'il sera conduit dans une maison de correction pour y être élevé jusqu'à ses vingt ans.”
En colonie pénitentiaire, voilà la solution décidée par nos aïeux pour tous les enfants malfaisants. Des établissements, certes rudes, mais qui remettaient les racailles dans le droit chemin. Quand, sous le futile prétexte de maltraitances, des jeunes détenus du bagne de Belle-Île-en-Mer se révoltèrent en 1934, le laxisme commença à s'installer. À part Giorgio Scerbanenco dans “Les enfants du massacre” (Rivages/Noir, 2011) et quelques titres de G.J.Arnaud ou de Brice Pelman, tous les mômes seraient des anges. Même George Pelecanos imagine, dans “Mauvais fils” (Seuil, 2011), la réinsertion possible pour des ados délinquants. Décidément, la plupart des auteurs de polars sont complices d'un manque de fermeté envers les enfants...
On espère que chacun aura compris que cette présentation n'est pas à prendre au premier degré. Un brin d'ironie sur un sujet sensible n'est jamais inutile. Et pour continuer à faire le parallèle entre enfance et polar, il faut impérativement lire le dossier proposé par le magazine L'Indic, dans son nouveau numéro. Ce thème y est exploré par Caroline de Benedetti, Betty Douet, Thierry Picquet, Sylvain Forge, Jocelyne Hubert, Geoffroy Domangeau, Éric Maneval, Julien Védrenne... Au sommaire de ce n°16, on découvrira également :
Sévices : Les mots-croisés de Jacques Mailhos
Nécro : No more Elmore ! par Jocelyne Hubert
Garde à vue : Robert Darvel
La musique adoucit les moeurs : Dansez-vous le sabar ? (Les marques du fouet, Gérard Streiff) par Emeric Cloche
Focus : Femmes blafardes par Julius Marx
Dernière séance : Ciné club Fritz Lang / Beat Takeshi (par Julius Marx)
Verdict : Jeux d'enfants, Jonathan Trigell - Protocole 118, Claire Le Luhern - Djebel, Gilles Vincent - En un monde parfait, Laura Kasischke - Nous sommes un orage sous le crâne d'un sourd, Chaïm Helka - Toubab or not toubab, Jean-Claude Derey - Je tue les enfants français dans les jardins, Marie Neuser - Final Cut, Roger L. Simon - Les vestiges de l'aube, David S. Khara - Intermittence, Andrea Camilleri - Ce qui reste en forêt, Colin Niel - 400 coups de ciseaux, Thierry Jonquet - La méthode du crocodile, Maurizio de Giovanni - Les guetteurs, Ian Rankin - Quitte ou double, Cyrille Legendre - Rupture, Simon Lelic - Sur la ligne noire, Joe R. Lansdale - Le vol et la morale, Myriam Congoste - On ne joue pas avec la mort, Emily St. John Mandel - Du vide plein les yeux, Jérémie Guez
Bande Originale : Associés contre le crime, Basic Instinct et Drive, par D.J. Duclock
Main courante - Comparution immédiate
Portrait, Hafed Benotman par ArtphotoLLG
On se renseigne dès maintenant via le site ci-dessous...